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18 novembre 2008 2 18 /11 /novembre /2008 00:00

Un jeudi, à Vienne, environ 90 ans avant François Feldman. Dans la cheminée crépitent des pages de l’annuaire déchirées en lambeaux. On se sert un verre, pour précipiter la nuit. Le fauteuil est lourd, il s’éteint à petit feu, guidé par le parfait immobilisme de son prestigieux occupant.

-         « Chéri, t’es allé sortir les poubelles ? »
-         « Ouais, bien sûr. »
-         « Ah ouais ? »
-         « Ouais ouais. »
-         « Te fous pas de moi, Sigmund, elles sont encore dans la cuisine. »
-         « T’as dû rêver. »
-         « Sigmund, je suis pas folle, arrête de me mentir. T’es pas allé les descendre ! »
-         « Ouais non tu dois rêver, laisse moi tranquille, là. »
-         « Je rêve pas putain, elles sont là, devant mes yeux ! »
-         « Ecoute, en vérité j’ignore si je suis bien allé descendre les poubelles. Mais ce dont je suis certain, c’est que l’interprétation des rêves est la voie royale qui mène à la connaissance de l'inconscient dans la vie psychique, et que la porte d’entrée près de la cuisine est la voie royale qui mène au jardin. »

Cette introduction à l’authenticité historiquement invérifiable est le prétexte à un article sur les poubelles, un sujet passionnant au cœur de la vie de millions de Français. Enfin plutôt « était le prétexte », car un facétieux plaisantin a vidé hier soir le contenu de mes fichiers Word, m’obligeant à écrire en toute hâte une notule de remplacement : l’interprétation des rêves.

Puisque je n’y connais absolument rien en interprétation des rêves, j’ai convié le spécialiste mondial et recordwomen chronométrique de la discipline Sigmund Freud à participer à l’article. « Il est malheureusement mort depuis 1939 », m’a certifié sa famille lors d’un entretien téléphonique. « C’est pas grave, même mort, il est plus crédible que tous mes chroniqueurs réunis », j’insistais, avant de baisser pavillon face au coût exorbitant du rapatriement de son cercueil jusqu’à Paris.

Qui allait donc bien pouvoir analyser les onirismes complexes(és ?) de mes patients ? La réponse surgit de l’annuaire, une nouvelle fois.

 Les rêves de nos cobayes :

 
Gérard Crobard, chroniqueur du Blog de Myblack : « Je marche dans Paris sur le cou d’une girafe. A un croisement, j’intercepte un bébé nonchalamment posé près d’une fenêtre : il possède une moustache et, sur son front, est gravée la déclaration d’indépendance des Etats-Unis. Sur le ciel, à l’instar de la chauve-souris de Batman, apparaît sous la forme d’une ombre le derrière de Julien Doré. Il m’aspire alors, moi et l’enfant, et je me réveille généralement là. »



 
Teckel Enragé, bloggueur : « Je suis une rock star célébrée dans tout l’Auvergne et je fais l’amour avec les plus belles femmes de Clermont-Ferrand. Elles défilent dans ma chambre habillées en courgette et réalisent mes fantasmes les moins assouvis. Soudain, ma mère arrive complètement nue, le corps trempé de Nutella, et je me réveille en sursaut. »


Jean-Michel Lapoisse, célibataire : « Cours d’histoire de fac, portant sur les soulèvements populaires dans l’Europe de la fin du Moyen Age. On nous a imposé une femme comme prof, ce qui est rare. Sur les 29 enseignants qui dépriment dans ma fac, seuls 6 ont du rouge à lèvres. Perso, j’en ai connu 3, avant celle-ci : une grosse vieille, une moche qui essayait d’être comique pour faire passer l’inanité de ses cours et la prof de géo avec les beaux seins. Cette femme-là, j’en avais entendu parler avant : elle n’est pas méchante, mais totalement incompétente. Un mois que les élèves la supportent en complétant ses paroles sur des bouquins. Aujourd’hui, y a plus de monde que d’habitude : il faut s’entretuer pour trouver une place convenable, pas trop près du prof, quoi, et comme j’ai laissé les autres s’entretuer pour la rangée où bivouaquent les rares gens que je connais, je n’ai pas à chercher d’excuses pour fuir leur austérité scolaire. Je me suis donc assis tout en haut, comme un resquilleur du bus, près d’une fille blonde et d’un groupe de 4 étudiants, qu’on appelle les Dalton. Les Dalton, dans l’échelle de popularité de l’amphi, sont entre Déborah et Florent, le mec qui s’habille uniquement avec le maillot du PSG. On les appelle les Dalton parce qu’ils sont 4 et qu’un d’entre eux est vraiment petit : les autres sont de même taille, mais ça suffit pour être accablé d’un surnom qui vous poursuit pendant 3 ans.  Comme prévu le cours est merdique : une crise hussite a éclaté en 1420 en Bohême – ce qui a poussé Joe à fredonner du Aznavour, ce qui a beaucoup fait rire William -, des papes se sont succédés – Averell a sorti que certains papes étaient moins importants que d’autres, qu’ils étaient uniquement là pour assurer la sécurité des habitants, que c’était en fait des « Sous-papes de sécurité », et ça a fait se bidonner Jack et Joe, car William n’a pas compris -, que le Duc de Bourgogne rêvait de réunifier la Lotharingie – Jack a aussitôt demandé à Joe si c’était pas une maladie de l’oreille, la Lotharingie, et Joe, réactif, a répondu que si, que William l’avait eu, et que soit on en mourrait, soit on en restait con à vie, et c’était bien répondu même si c’était pas de lui, cette blague, mais de Mac-Mahon, je crois -, que la ville de Gand, en Belgique, s’est révoltée à plusieurs reprises contre les riches – mais là bizarrement personne a balancé le moindre jeu de mot -, et plein d’autres trucs inutiles que mêmes les filles risquent de ne pas apprendre. Dans leur groupe, contrairement à celui que je forme avec mes camarades, il ne semblait pas y avoir de chef : William tenait simplement un rôle de bonne pâte consentante. Ca me changeait de l’omnipotence de Fred. C’était un groupe vraiment différent du notre, sans doute à cause de l’absence totale de filles : les membres pouvaient s’y lâcher sans crainte. C’est ce qu’ils faisaient, d’ailleurs : les Dalton tournaient à plein régime, et même la blondasse à ma gauche s’est mise à rire de leurs conneries, ce qui m’a immédiatement fait tomber amoureux et, comme j’avais des lentilles, j’ai réussi à lui parler, à la faire rire aussi, ce qui était parfait : ma réussite sociale ne reposant que sur l’humour, ma seule chance de séduire une fille est de la faire rire, puisque physiquement je suis largué, même si j’ai ôté mes lunettes pour gagner en séduction. D’ailleurs, mes blagues fonctionnent mieux que quand j’avais mes lunettes, et pourtant je n’ai pas l’impression d’être plus drôle qu’avant, et en plus elle était très sympa, cette blonde, pour une blonde, pas du tout prétentieuse et tout, non, c’était bien, ce cours ; sans mes lunettes, j’ai tenté plein de choses que je n’avais jamais essayé auparavant, du genre demander son prénom sans l’imaginer cinquante fois dans ma tête, du genre regarder sur sa feuille, la taquiner un peu sur son écriture de fille, du genre les choses que feraient Fred et c’était super, ce cours. J’hasardais même des jeux de mots sur le cours qui plaisaient aux Dalton, surtout à Joe. Mon attention oscillait entre la blonde et leur humour, et, peu à peu, je devenais complice, allié. Malheureusement, les Dalton ont commencé à déraper, incités par l’aisance du dernier rang. Ils ont commencé à être très lourd, à réagir au moindre mot, à envoyer des morceaux de gommes et c’était même plus drôle, et ça a rendu la blonde un peu crispée, si crispée qu’elle n’a plus rien dit du tout. Ca a rendu l’amphi entier crispé, même, tellement que la larve qui servait de prof leur a demandé de se taire, et Joe, William, Jack et Averell lui ont répondu que c’était pas eux, et la prof a dit que si, et qu’ils ont fait que non, que ça devait venir d’à côté, et l’amphi entier s’est alors rendu compte qu’à côté des Dalton y avait un nouveau mec, que ce nouveau mec c’était moi, et que ce nouveau mec, c’était Rantaplan. »

   

L’interprétation de nos spécialistes :

  Fred (attaquant brésilien de Lyon)

 - Gérard Crobard / « Voilà un rêve totalement désorienté, tourné vers l’offensif. Il faut que Gérard conserve certaines bases crédibles, sinon il s’expose à de graves désillusions. Il a fait un bon début de rêve avec de l’intensité mais sans pour autant être efficace dans la concrétisation : il aurait dû interagir avec la girafe, lui parler, jouer au yam’s avec elle, et pas simplement grimper sur son cou. Ensuite, il subi le reste du rêve sans jamais imposer un autre schéma imaginatif, ce qui est très surprenant quant on connaît son goût pour les gestes techniques et la cocaïne. Néanmoins, à en juger par le slip de l’enfant, il a mouillé le maillot, et ça c’est un point positif. »

 - Teckel Enragé / « L’important pour lui est de prendre les filles l’une après les autres, d’enfiler les préservatifs sans calculer et de tout donner, car la soirée est encore loin d’être terminée. Le Teckel est attendu à la tournante mais il espère marquer beaucoup de buts pour ensuite partir vers un championnat plus relevé, comme Paris, Macao ou la Thaïlande. Mais attention tout de même à cette attirance douteuse pour les barres transversales de ses potos. »

- Jean-Michel Lapoisse / « Désolé, j’ai séché l’entraînement, c’était trop fatiguant. Demandez l’analyse à un autre joueur. »

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 Fred (doublette d’Omar)

  
 - Gérard Crobard / « ouais pas mal pas mal hé bah tu sais quoi ? Je pense que la girafe, de lui, elle en a plein le cou. Hé hé hé ! »

 - Teckel Enragé  / « Apparemment il aime bien le sexe, le clébard, là. Attends me dis rien : il lui a fait la position du lévrier, non ? Hé hé hé ! »

 - Jean-Michel Lapoisse / « Hé ben, pffiou, j’ai pas tout lu, mais ce que je peux déjà affirmer, c’est que Lapoisse, il a pas de chance ! Hé hé hé ! »

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  Fraude (alias Jérôme Kerviel)

 - Gérard Crobard / « Je ne peux rien dire tant que l’enquête suit son cours. »

 - Teckel Enragé / « Je soupçonne fortement ce mec d’avoir truqué son rêve plat et banal pour y augmenter son stock-option de jeunes filles à poil et y multiplier les prises de positions bien dissimulées, du genre inconnues jusque dans le Kamasutra. Par contre il a l’air de s’y connaître autant en bourse que moi.

 - Jean-Michel Lapoisse / « Plutôt aller en prison que d’analyser un rêve pareil ! »

 
 

Merci quand même d’avoir fait le déplacement.

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commentaires

M
Mais il a été incinéré, Freud. On a même volé le vase avec ses cendres dedans, m'a-t-on dit (bien joué !! je me doutais depuis un moment que c'était vous).
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J
Le rêve trop chiant de Jean-Michel.
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N
LA question étant, maitrise-t-il mieux le sujet du sortage de poubelle ? Louna, des commentaires ?
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M
<br /> Elle descend les poubelles et elle vous réponds<br /> <br /> <br />