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28 septembre 2007 5 28 /09 /septembre /2007 00:02

G--rard-crobard-petit.JPG Salut les pisseux, c’est moi, Gérard Crobard, le grand manitou du cinéma français. J’ai toujours considéré Jean Dujardin comme un gros con lourdingue qui fait prout sous la douche et Frédéric Beigbeder comme un puceau myope à pellicules prétentieuses ; mais je suis un professionnel et je vais néanmoins effectuer la critique de 99 francs sans partis pris déplacés, en me focalisant simplement sur l’affiche.


99-francs.JPG
 
 


Le film semble se dérouler dans un supermarché de la région parisienne, à en juger par la géométrie du carrelage rappelant la ligne B du RER. Le personnage principal, un caddie à une roue, effectue ses courses hebdomadaires au rayon des acteurs bankables. Nous le devinons féminin :

 - Elle est venue seule, fragile et indépendante

- Elle occupe le devant de la scène, égoïste et fanfaronne

 - Elle s’est arrêtée au stand Dujardin, célibataire et coquine
 

Sans doute a-t-elle craqué sur le jeans court et les lunettes d’étudiant en latin du produit. Ce côté mystérieux qui attire les femmes autour d’un capuccino sans sucre et qui finit, inlassablement, par conquérir leur mont de Vénus. Les hommes à lunettes, outre une intelligence évidente, marient le charme sensuel des latins, la rigueur métaphysique des nordiques et l’énorme kiki des ivoiriens, aussi énorme que le nom en caractères gras de Brice de Nice auréolant le chariot à roulettes.

Autour du caddie des centaines, que dis-je, des milliers de Jean Dujardin en conserve. La bobine tournée vers le spectateur, ils font de l’ombre à l’interprétation de la poussette métallique. Choix logique, après tout : délaissant son caddie majeur pour diviniser la marchandise Dujardin, le réalisateur Jan Kounen conforte ainsi l’angle du film : le diktat de la publicité et de ses produits surfaits. Se voulant critique du milieu publicitaire et de ses attrape-mouches, 99 francs est finalement tombé dans le vide qu’il voulait dénoncer. L’acteur est à la mode : les salles de cinéma sont entrecoupées par son visage. Le loulou est devenu chouchou ; la crotte de nez a pris de l’assurance au point d’éclipser la lune de Jean Reno ou de Clavier, les vedettes de l’avant-siècle. Nous n’irons pas voir 99 francs, mais Jean Dujardin.
 
Lorsque je fais les courses, j’achète toujours une boîte de petits pois, généralement à l’étuvée. Bonduelle les propose extra-fins dans un excellent rapport qualité/prix ; la marque se prévaut même d’une sélection préalable (selon des critères de tendreté, de souplesse, de gravité, de circularité) à laquelle aucun être humain ne peut décemment résister plus de trois minutes. Facile d’accès, elle a su rester naturelle sans abuser de scènes érotiques avec Elisa Tovati. Le prix est raisonnable et permet plusieurs repas sans se ruiner : les différents formats s’adaptent aux différents heures du jour (matin, midi, goûter, soir) pour former, au rayon conserve, un alléchant présentoir tapissé d’émeraude. Il m’apporte les vitamines B dont j’ai besoin chaque jour pour coller les affiches du Front National sur les volets musulmans des voisins.
 

Ceux de chez D’Aucy n’appartiennent pas au même monde. La boîte est plus grosse, s’impose sans demander la permission. On se sent attaqué, agressé dans notre chair. Les légumes sont arrogants, travaillent pour Technikart. On aurait aimé plus de chaleur, plus d’introspection autour de nos états d’âmes de consommateurs. C’est cette marque, que j’achète. Je n’ai pas le choix, mon Auchan ne propose qu’elle. Bonduelle a oublié d’y faire sa promotion. Alors je parcoure les dalles macabres en pensant à cette rondeur que je ne retrouve pas chez sa concurrente. « Oui, j’achète des petits pois, et j’espère y trouver l’amour ! », vocifère-je à tue-tête devant ces D’Aucy froides et glacées, bravant le mépris des passantes inconscientes qui choisissent ces légumes bankable. Le manège dure depuis des années, lentement mon corps s’est déshydraté à force de le combattre stérilement. Ils m’épient – de maïs -, rigolent de mon malheur en salivant leurs injonctions. « Cosse toujours, tu m’intéresses ! », j’hurle comme un loup, en rampant sur la devanture des robes. Mais je ne suis qu’un mouton qu’on empêche de brouter à sa guise, enfermé entre des réductions sur les yaourts et des murs aussi grands que leur indifférence. « Mais où es-tu, toi que j’aime, ma divine promise ? », je m’égosille, en lançant sur des retraités podagres ces D’Aucy qui ne font qu’un avec Dujardin. Chacun de leurs pleurs me fige davantage devant mon désarroi, et je leur supplie le silence. « Taisez-vous, taisez-vous, taisez-vous, petits pois insolents », j’impose, je gémis, plus fort encore que les vieillards en sang, en multipliant les coups des pieds, les côtes fêlées et les braguettes désagrégées, puis je vais prendre de la margarine, du pain et de la moutarde, car il est déjà 18 heures 50 et je meurs de faim, avec toutes ces émotions.

 

99 francs

De Jan Kounen
Avec un caddie, des petits pois d’Aucy et des cadavres de grabataires
Durée : la vie entière
 
Note : ananas-copie-2.jpg

 

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commentaires

B
"Bizarre mais sympa."<br /> <br /> Jan Kounen quoi.<br /> prout<br /> enfin pour le bizare à tout le moins.
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H
Au fait ce film est pas mal du tout. Bizarre mais sympa.Assez dans l'esprit du bouquin bien que prenant pas mal de liberté.
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M
Au début je devais faire un erratum à chaque erreur aperçues dans ce blog dans un second blog, mais je me suis rapidement rendu compte que cela me donnait davantage de travail que l'écriture des articles du 1er blog.Erratum : ce commentaire est illisible, ne le lisez pas.
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M
On t'a dit les GAMETES ! Nouille !!Tiens, cela m'inspire une réflexion métaphysique de premier ordre... quel pourrait bien être le pourcentage des personnes francophones ne lisant pas les erratums... En même temps, on s'en fiche un peu, en fait.
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L
Entre les fesses molles et les gonades de papa, hum délicieuse ambiance ici.
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